Jetez l’ancre !
Quoi de plus simple en apparence… mais tant de déboires pourtant !
Peut-être l’expression « prendre un mouillage » invite-t-elle à un peu plus de précautions et de technique.
Si nous sommes tous bien d’accord pour énoncer que mouiller une ancre consiste à bloquer votre bateau sur un point fixe et non pas à labourer les fonds pour finir au large (vous avez eu de la chance !) ou sur la plage (ce n’était pas votre jour !), si nous sommes tous d’accord sur ce postulat, alors il convient d’énoncer quelques précautions pour y parvenir….
– Tout d’abord choisir la nature du fond qui va accueillir votre ancre ; le sable ou la vase sont idéaux, les fonds herbeux nécessitent moult précautions et les fonds rocheux sont à proscrire sauf si vous êtes équipés de tout le matériel de plongée !
– La longueur de votre ligne de mouillage. Dès le départ, il ne faut pas hésiter sur la longueur de la ligne. On parle de trois fois la hauteur d’eau, c’est un minimum et, quoi qu’il en soit, ne descendez jamais sous les quinze mètres. C’est au moment même de la manœuvre que votre ancre doit être sollicitée, il faut donc la mettre dans les meilleures conditions de travail… Et les meilleures conditions de travail c’est lorsqu’elle subit sa traction le plus à plat possible sur le fond ; jamais, sous la traction, la chaîne ne doit décoller du fond dans les trois à cinq mètres juste après l’ancre ; pour cela il faut jouer sur la longueur. C’est de cette manière seulement que cette dernière, de par sa forme, garde sa tendance naturelle à s’enfoncer dans le sable et non l’inverse.
La manœuvre de mouillage en elle-même.
Elle doit être plutôt énergique et s’effectuer en un seul acte. A l’instant même où vous « jetez l’ancre » vous devez être face au vent, bateau totalement arrêté et mieux encore ayant déjà amorcé son recul. L’ancre part et les quinze mètres de chaîne derrière (ou plus si vous avez mouillé par plus de 5 mètres) et tout cela d’une seule traite. Ainsi, la chaîne va s’étaler derrière l’ancre qui va, elle, très vite subir sa charge. De deux choses l’une, l’ancre croche énergiquement, la chaîne se tend fortement et « rappelle » le bateau qui ré-avance donc, vous avez gagné ; ou alors, la chaîne, se tend, se détend, mais jamais le bateau n’amorce de marche avant… Perdu, il vous faut remonter le mouillage, vérifier que l’ancre ne soit pas « engorgée » d’herbes et recommencer !
La encore deux précautions sont nécessaires :
– Avoir pris la peine de bloquer votre chaîne au taquet mais les guindeaux ne le permettent pas ;
– Faire en sorte que la chaîne soit débitée rapidement donc quelle soit bien « claire » avant la manœuvre.
Si votre bateau est équipé d’un guindeau, je vous conseille donc de faire la manœuvre en deux temps, d’abord jeter l’ancre et étaler la chaîne sur le fond en marche arrière modérée ; ensuite sortez votre chaîne du guindeau, tournez la chaîne au taquet et crochez votre ancre par une énergique marche arrière au moteur. Toujours votre bateau doit tendre sa chaîne et revenir ensuite sur l’ancre, ce n’est qu’à cette condition que vous pourrez débarquer en toute tranquillité.
D’autres conseils :
– Si vous avez l’impression que votre voisin « sous le vent » s’est rapproché c’est peut-être que les données de vent et/ou de courants ont changé, prenez un temps d’observation mais ne remontez surtout pas de chaîne… Si vos impressions se confirment, il faut vous y résigner et recommencer la manœuvre !
– Si vous avez mouillé à marée montante, n’oubliez pas de rallonger votre longueur de chaîne… Trois fois la longueur à marée basse n’y suffiront plus à la pleine mer !
– Un peu de respect pour votre guindeau ! Il n’est pas vraiment fait pour subir la traction d’une ancre qui s’accroche au fond et rappelle le bateau… Pour la même raison, une fois le bateau bien en place, soulagez votre guindeau en passant la chaîne sur un des taquets du bateau… La brise de nuit peut souffler fort !
– En jetant votre ancre alors que vous êtes en marche avant, vous prenez le risque que votre chaîne s’étale devant l’ancre et accroche ensuite celle-ci par l’avant lorsque le bateau se mettra à reculer… Le dérapage est assuré et mieux vaut qu’il se fasse de suite plutôt que dans la nuit !
Denis Brière : notre consultant Navigation France Voile Loisirs